LE CONSEIL national de l’Ordre des médecins (CNOM) voit rouge. Il estime que la campagne de communication du groupement Giphar (le « Quotidien » du 4 décembre 2008), mais aussi le contrat « Réflexe, prévention, santé » proposé par la mutuelle MTRL et les Assurances du Crédit Mutuel (notre édition du 23 avril 2007), piétinent les plates bandes du corps médical. Décidé à ne pas se laisser faire, le CNOM indique qu’il a pris la décision d’intenter des poursuites judiciaires contre les acteurs et les promoteurs de ces opérations au motif qu’elles « favorisent un exercice illégal de la médecine et constituent une publicité trompeuse pour les patients ».
Une formalisation des actes pharmaceutiques.
Plus précisément, l’instance ordinale accuse la campagne du Giphar, diffusée à la fin de l’année dernière, de promouvoir « une consultation aboutissant à conseiller un traitement personnalisé et des adaptations de posologies ».
Faux, rétorque l’intéressé par la voix de sa présidente, Brigitte Bouzige. « D’abord, nous n’avons jamais utilisé le mot consultation, assure-t-elle. Ensuite, comment pourrait-on conseiller un traitement qui ne serait pas personnalisé ? Par exemple, il semble évident que l’on ne dispense pas la même spécialité à un adulte de 75 kg et à un enfant de 4 ans. » La présidente du Giphar réfute également l’accusation d’incitation à l’adaptation de posologies. Il s’agit en fait de préciser au malade une posologie adaptée, telle que le mentionne d’ailleurs le visuel de la campagne. « Nous le faisons oralement depuis très longtemps, souligne Brigitte Bouzige. Notre démarche vise à formaliser cet acte par écrit. » Les patients gardent ainsi une trace du conseil délivré par leur pharmacien. « La communication Giphar a seulement pour objectif de formaliser des actes pharmaceutiques que nous réalisons chaque jour à l’officine depuis des années », conclut la présidente.
Une guerre des nerfs.
Le contentieux de l’Ordre des médecins avec la MTRL et les Assurances du Crédit Mutuel est plus ancien. L’affaire remonte à avril 2007. À cette époque, les syndicats d’officinaux signent un accord avec ces organismes complémentaires, prévoyant notamment la prise en charge d’un bilan de prévention personnalisé réalisé par le pharmacien et rémunéré sur la base d’une consultation de médecine générale. Un mois plus tard, le CNOM, mais aussi les syndicats médicaux, demandaient la suspension du dispositif, estimant que ce bilan personnalisé était en réalité une consultation. Tous dénonçaient une confusion des genres et une tentative d’exercice illégal de la médecine.
Comme lors de cette précédente affaire, l’offensive du corps médical étonne quelque peu les syndicats d’officinaux. En effet, ni le Giphar, ni la MTRL n’ont utilisé le mot consultation dans leur communication, font-ils remarquer. Pour eux, la vive réaction des médecins est tout simplement liée à l’approche de l’examen de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST). Cette future loi, dont l’ambition est notamment d’améliorer la coopération entre professionnels, pourrait bien étendre les compétences des pharmaciens dans les domaines de la prévention, du dépistage ou de l’éducation thérapeutique. Un récent rapport parlementaire, dont les propositions pourront faire l’objet d’amendements à la loi HPST, préconise même de leur accorder de nouvelles tâches, telle la prise de tension.
Un tour de force.
Les médecins ont senti le vent du boulet passer. Et, à l’approche de l’échéance parlementaire, ils auraient donc tenté un ultime tour de force pour intimider la ministre de la Santé. C’est le sentiment de Gilles Bonnefond, président délégué de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). « Les médecins jouent les gros bras, estime-t-il. Ils s’excitent sur des faux sujets et s’insurgent lorsque nous menons des actions de prévention. » Or, au regard de la démographie médicale actuelle, la coopération interprofessionnelle se justifie pleinement, ajoute-t-il. Pour lui, le rapport de force engagé par les médecins va finalement obliger à être plus précis dans la définition des nouvelles missions des pharmaciens qui seront inscrites dans la loi HPST. Le corps médical ne pourra alors plus contester les actions des officinaux. Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), craint pour sa part que la démarche du CNOM bloque les discussions. Pourtant, pour lui, cela ne fait aucun doute : toute évolution des champs d’intervention des professionnels de santé, au sens large, doit se faire de façon concertée.
L’officine semble disposée à dialoguer. De son côté, l’Ordre des médecins mettra-t-il ses menaces à exécution ? Pour l’heure, le Dr André Deseur, du CNOM, indique que les avocats de l’institution ont été saisis et réfléchissent au meilleur angle d’attaque.
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