Je réagis à la lecture de l’article intitulé « Délivrance des médicaments vétérinaires et réglementation » publié le 18 février 2019 dans le « Quotidien du pharmacien ».
On peut y lire que le renouvellement de la délivrance des médicaments vétérinaires est interdit si, je cite : « le médicament contient des substances vénéneuses listées I sauf mention écrite du vétérinaire précisant le nombre de renouvellement ou la durée du traitement » !
Depuis 2007 je me permets de vous rappeler que les médicaments listés I sont au contraire toujours renouvelables sans l’avis du vétérinaire dès lors qu’ils figurent sur la liste prévue à l’article L.5143-6 du CSP - il suffit pour cela que l’ordonnance soit en cours de validité - (moins de 1 an) et que les médicaments soient bien destinés aux mêmes animaux que ceux figurant sur l’ordonnance).
Les mentions du vétérinaire relatives au renouvellement sont dans ce cas toujours inopérantes, seul le détenteur des animaux décide de faire renouveler ou non la délivrance des médicaments, que ceux-ci soient listés I ou II.
Sur cette question du renouvellement, il eut d’ailleurs été hautement souhaitable de saisir l’opportunité de cet article pour rappeler aux confrères que la mention « renouvellement interdit » pré-imprimée sur les ordonnances est totalement proscrite par la loi (alors que cette mention pré-imprimée est toujours omniprésente malgré la réglementation existant depuis 2007 !).
Réponse du Dr Florence Le Sueur Almosni
En pratique, le cas que vous avez soulevé, et que je n’ai pas abordé, ne concerne que la délivrance à un éleveur des médicaments destinés aux animaux de rente de son élevage faisant partie d'un groupement agréé, l’ordonnance ayant été établie par le vétérinaire responsable du suivi sanitaire de son élevage qui a établi avec l’éleveur un protocole de soin sur la base d’une visite annuelle au moins. De ce fait très peu de pharmaciens se trouvent confrontés à ce problème, l’éleveur se tournant en majorité vers sa coopérative pour obtenir ses médicaments.
Dans ce cadre déjà très restreint, vous avez soulevé la question du renouvellement des ordonnances à la suite des nouvelles règles de prescription établies en 2007 concernant les vétérinaires travaillant dans les élevages et qui réalisent un suivi sanitaire permanent de ces élevages.
Le conseil de l’ordre des vétérinaires (Revue de l’Ordre National des Vétérinaires, n° 53, août 2014, p15) répond précisément à cette question et confirme les conditions de ce renouvellement, à savoir les cas où les médicaments sont utilisés à des fins prophylactiques pour les affections habituellement rencontrées dans un élevage considéré (répondant au protocole de soin établi).
Cet avis du CNOV s’appuie sur le Décret no 2007-596 du 24 avril 2007 qui stipule :
1. Le renouvellement de la délivrance est interdit pour les médicaments vétérinaires contenant des substances mentionnées soit aux c, f ou g de l’article L. 5144-1 du présent code, soit au II de l’article L. 234-2 du code rural.
2. La délivrance peut être renouvelée pour les médicaments vétérinaires contenant des substances vénéneuses, si celles-ci figurent sur la liste prévue à l’article L. 5143-6 et si le médicament est utilisé pour le traitement prophylactique des affections habituellement rencontrées dans l’élevage considéré.
Si les substances vénéneuses ne figurent pas sur la liste prévue à l’article L. 5143-6, ou bien y figurent sans que le médicament soit utilisé pour le traitement prophylactique des affections habituellement rencontrées dans l’élevage considéré, la délivrance des médicaments vétérinaires relevant de la liste I des substances vénéneuses ne peut être renouvelée que sur indication écrite du vétérinaire prescripteur précisant le nombre de renouvellements ou la durée du traitement et la délivrance des médicaments vétérinaires relevant de la liste II des substances vénéneuses peut être renouvelée lorsque le prescripteur ne l’a pas expressément interdit (…). Ce qui rejoint le cas général que j’ai exposé dans mon article.
Cette précision sur le caractère prophylactique est utile car de nombreux médicaments inscrits sur la liste du L.5143-6 pour usage préventif ont bien souvent dans leur RCP des indications à la fois préventives ET curatives (cas de nombreux antiparasitaires, comme les anthelminthiques ou les anticoccidiens).
La position du législateur consiste en fait à ne pas favoriser le renouvellement de type automédication par l’éleveur dans le cadre d’un traitement curatif, lequel nécessite un diagnostic vétérinaire. Il est cependant difficile pour un pharmacien de savoir si l’éleveur souhaite renouveler la délivrance d’un médicament à titre prophylactique, ou hors du cadre légal (pour un traitement curatif devant faire l’objet d’un examen vétérinaire). La seule chose que peut faire le pharmacien c’est vérifier que l’ordonnance est valable (établie depuis moins d’un an par le vétérinaire du groupement agréé réalisant le suivi de l’élevage en question), que les médicaments se trouvent bien sur la liste positive (qui change régulièrement), qu’il n’en délivre pas pour plus d’un mois, et poser la question « est-ce dans un but prophylactique ou non ? » Si la réponse est non, selon la loi, le renouvellement ne peut se faire si la substance est sur liste I et qu’il n’y a pas la mention écrite du vétérinaire (et ce, bien qu’elle se trouve sur la liste positive). Si la réponse est oui, le pharmacien peut délivrer le médicament. Cette situation reste donc très exceptionnelle.
Par contre, le vétérinaire peut ne pas accepter de renouveler la délivrance du médicament s’il suppose une utilisation dans un but curatif et effectuer dans ce cas une visite de l’élevage ainsi que des examens complémentaires. Il reste maître de sa prescription.
J’ajoute enfin que dans le cadre des bonnes pratiques d’utilisation des médicaments antiparasitaires (largement représentés dans la liste positive accessible aux groupements agréés), les vétérinaires ruraux sont de plus en plus soucieux de réduire l’utilisation de ces produits, pour limiter l’apparition des résistances aux antihelminthiques et limiter l’impact écotoxicologique. De fait, l’automédication par l’éleveur hors du cadre légal est plus que jamais considérée comme une pratique à risque.
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