M. COTIS nous fournit d’excellents éléments d’information : le partage de la richesse produite est resté plutôt stable ; en gros, deux tiers de cette valeur sont allés à la masse salariale, un tiers aux profits. C’est plus ce que préconise Nicolas Sarkozy, qui a évoqué la règle des trois tiers : un tiers pour les salariés, un tiers pour les actionnaires et un tiers pour les investissements. Le rapport Cotis, en quelque sorte, semble indiquer que le chef de l’État n’est pas assez ambitieux pour les salariés et que, si sa règle des trois tiers était appliquée, les salariés seraient encore moins riches.
Cependant, note M. Cotis, malgré un abondement apparemment généreux, les salaires n’ont pas augmenté suffisamment. Il incrimine la faiblesse des gains de productivité, alors que nous nous targuons d’avoir l’une des productivités les plus élevées du monde. Une productivité basse entraîne, selon lui, une pression sur les salaires parce que la marge des entreprises est limitée. Le directeur général de l’INSEE estime aussi que les emplois créés en France sont en général peu qualifiés, donc moins bien rémunérés, de sorte que l’écart ne cesse de croître entre les fonctions à faible valeur ajoutée et les emplois plus productifs. Il en résulte une inégalité considérable entre les revenus. Le recours très fréquent aux contrats à durée brève complète un tableau où le salarié a du mal à joindre les deux bouts : le CDD est une source de précarité, même si la multiplication des CDD accroît beaucoup la masse salariale.
Le rapport est une étude scientifique effectuée sur la base de paramètres qui démentent quelques idées reçues, notamment l’avarice des entreprises: elles seraient plutôt soucieuses, depuis que la bourse a pris le pas sur toute autre considération, de satisfaire leurs actionnaires. Faut-il pour autant écarter les ravages du nouveau capitalisme ? En réalité, seule la loi protège les salariés, pas l’empathie sociale. Si l’intéressement et la participation n’existaient pas dans les entreprises d’un certain gabarit, le salarié n’aurait pratiquement aucun moyen de gagner un peu plus que le salaire fixé au moment de l’embauche et qui, ensuite, évolue très lentement. Les chocs pétroliers ont créé, en France et ailleurs, un chômage structurel dont nous commencions à peine à nous débarrasser lorsqu’a éclaté la crise très aiguë de l’année dernière. La France est retombée dans l’ornière d’un chômage massif qui pourrait dépasser les 10 % dès la fin de l’année. Le manque d’emplois exerce naturellement une pression énorme sur ceux qui en ont un. Il est facile d’opposer à leurs revendications le risque de suppressions de postes que dicterait une augmentation de la masse salariale.
Beaucoup de facteurs négatifs.
M. Cotis note aussi une forte hausse des dividendes depuis les anées 1990, qui n’a pu se produire qu’au détriment des salaires. La dictature de la Bourse n’est donc pas négligée par le rapport. Elle s’ajoute à la réduction du temps de travail. On a dit que la productivité suffisait à compenser la réduction de la semaine de travail à 35 heures. En réalité, les RTT ont exercé une force hostile aux augmentations négociées. Même les syndicats n’ont pas osé dire, à partir de 2000, que l’on pouvait à la fois travailler moins et gagner plus. La vérité est que les salariés ont payé la RTT en travaillant autant pendant 35 heures que pendant 39 et les embauches n’ont commencé à reprendre, avant la crise de 2008, que grâce au départ des baby-boomers à la retraite et une démographie qui, ayant légèrement baissé, a envoyé moins de jeunes sur le marché du travail. A la hausse des dividendes, à la diminution du temps de travail, à une faible qualification s’est ajoutée la mondialisation qui continue à favoriser les délocalisations, donc les suppressions de postes qui ne favorisent guère les hausses de salaires.
M. Sarkozy a bel et bien l’intention de faire une loi de sa règle des trois tiers, qui est rejetée par le MEDEF, lequel estime que les actionnaires sont les seuls propriétaires des profits et qu’ils doivent donc en faire ce qu’ils veulent. Mais, si le président a bien lu le rapport, ce n’est pas cette règle qui augmentera les salaires et réduira les écarts entre eux. On doit donc surtout retenir du rapport Cotis l’impératif d’une formation qui crée des employés très qualifiés, les seuls qui, ces temps-ci, peuvent trouver un emploi.
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