« NOUS DONNONS l’éclairage de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP). C’est le point de vue du ballon : sans lui on ne joue pas, mais on ne lui demande jamais son avis. » Cette explication métaphorique de Claude Castells, président de la CSRP, illustre la situation actuelle des grossistes-répartiteurs. Cela fait plusieurs années qu’ils tirent la sonnette d’alarme. En premier lieu pour obtenir une modification de leur système de rémunération. « Nous avons une économie extrêmement fragilisée, nous perdons des ressources chaque année, 10 % en cinq exercices, notre résultat d’exploitation a dévissé de 50 % en trois ans… Le taux de marge est l’un des plus bas d’Europe, à hauteur d’environ 5 % après paiement de notre contribution à l’ACOSS*. Les pouvoirs publics ne nous entendent pas quand on parle de nos difficultés, on nous répond qu’il va falloir sortir 40 millions d’euros comme le prévoit dans le PLFSS** », explique Emmanuel Déchin, secrétaire général de la CSRP.
Première conséquence de cette décroissance : la crainte de ne pouvoir maintenir le haut niveau de service public de la répartition. Car ses obligations sont triples : la livraison d’un médicament dans les 24 heures, la mise à disposition des 9/10e des médicaments commercialisés et un stock d’au moins 15 jours. Or, comme le rappelle Claude Castells, les grossistes-répartiteurs sont bien les seuls à être soumis à ces obligations. « Il y a finalement peu de distributeurs qualifiés et certainement pas quarante. Pourtant, ils sont une quarantaine à être inscrits à la section C de l’Ordre des pharmaciens, dont une vingtaine a moins de deux ans », lance Jean-Luc Delmas, ancien président de cette section, et qui a occupé pendant plus de trente ans des fonctions dirigeantes au sein de la répartition. L’attaque à l’intention des short-liners et autre exportateurs est à peine voilée. Ces acteurs bénéficient en effet du statut de grossiste-répartiteur et donc de sa marge réglementée, sans répondre aux obligations de service public attachées à ce statut.
Qui va réguler la chaîne ?
« Une situation inéquitable que les pouvoirs publics laissent prospérer sans réagir, quand ils ne la favorisent pas », remarque Claude Castells. L’interrogation est la même qu’un an plus tôt pour Emmanuel Déchin : « Y a-t-il une volonté politique de piloter le système de distribution ? Les répartiteurs ne peuvent s’offrir le luxe d’être mis à l’écart de la distribution d’un certain nombre de produits ; il en va de leur responsabilité. Je crains qu’on arrive dans un système où les obligations de service public n’auront plus grand sens, parce qu’il faudra bien assurer la pérennité de l’entreprise et assurer la distribution des produits, selon un modèle qui aura été défini par ceux qui auront pris la main sur le système. La répartition ne mourra pas au champ d’honneur pour défendre les obligations de service public. »
Ce n’est pas faute d’avoir fait des propositions aux pouvoirs publics pour faire évoluer le système de la répartition, pour adapter la rémunération du secteur aux produits distribués et pour assurer au mieux la distribution spécifique de certains produits. « Nous en avons parlé au ministère mais nous n’avons pas de réponse. Nous en avons parlé aux laboratoires pharmaceutiques et ils sont preneurs de ces évolutions. » Car, comme le souligne Claude Castells, « ni les fabricants, ni les pharmaciens d’officine, ni la tutelle, ni les entreprises de la répartition prises individuellement n’a d’intérêt à faire disparaître le service public de la répartition. Le profit ne serait qu’à très court terme ».
En attendant, le secteur attend toujours de savoir comment faire évoluer son statut et sa rémunération. « Nous posions la question l’an dernier, nous sommes revenus à la case départ : Qui va réguler la chaîne ? L’État ou des opérateurs privés ? Quel est notre avenir ? Allons-nous tous finir short-liners, centrales d’achat ou nationalisés ? Rappelons que 99 % des médicaments sont distribués sans encombre. Pourquoi casser cet outil formidable ? »
** Projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
D’après un colloque organisé par la CSRP.
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