BIEN QUE LA RÉDUCTION du temps de travail hebdomadaire date de 1999, l’État continue à financer les entreprises à hauteur de 22 milliards par an pour compenser (par une baisse des charges sociales) le coût accru de la production. Cela revient à dire deux choses : que le passage de 39 à 35 heures a posé et pose encore, au moment où il est impératif de réduire les dépenses publiques et donc la dette, un énorme problème financier ; et que, bien que le gouvernement ait le couteau sur la gorge, il n’est pas en mesure de supprimer l’aide nécessaire à l’application des 35 heures. Autant pour ceux qui, non contents d’avoir chargé la barque de l’État il y a onze ans avec une complète absence d’irresponsabilité, reprochent aujourd’hui au pouvoir en place de ne pas savoir comment diminuer la dette publique.
Cinq lois.
Dès 2003, la droite revenue aux affaires s’est efforcée de réformer la réforme. En quelques années, cinq lois ont été votées qui, additionnées, n’obligent théoriquement aucune entreprise à respecter la semaine de 35 heures. Il n’empêche que la RTT continue à peser très lourd dans les comptes publics. Un retour aux 35 heures priverait les entreprises d’un atout financier et les contraindrait à licencier. Un rapport du COE (Comité d’orientation pour l’emploi) qui date de 2006 indique qu’une telle initiative se traduirait par la perte de 800 000 emplois en quelques années, ce qui serait inconcevable dans une France déjà sinistrée par la crise. En outre, sur le plan politique, faire travailler les salariés plus longtemps sans la moindre compensation financière serait suicidaire pour la majorité actuelle. Sans compter que les heures supplémentaires, actuellement exonérées d’impôts, disparaîtraient pour la plupart des salariés, alors qu’elles leur apportent un pécule non négligeable. Ce constat est dressé au moment où, dans les milieux économiques les moins suspects de socialisme généreux, des voix s’élèvent en faveur d’une augmentation généralisée des salaires. Cette proposition s’appuie sur plusieurs arguments : une augmentation du pouvoir d’achat des Français relancerait la consommation et donc l’emploi ; le nombre de gens qui travaillent mais n’en sont pas moins pauvres, endettés ou incapables de se loger ne cesse d’augmenter ; les entreprises sembleraient lésées par cette démarche mais y trouveraient leur compte au bout de quelques mois grâce à l’élargissement du marché intérieur. Une hausse des salaires, surtout des bas salaires, ne serait que justice. Mais il est probable que, face à une décision venue d’en haut et qui ne résulterait donc pas du jeu de l’offre et de la demande, les enteprises demanderaient, une fois encore, à être aidées par l’État. Lequel ne risque pas de prendre un nouvel engagement financier.
Il demeure que l’extension de la précarité, la paupérisation des ménages les moins protégés contre la crise, l’insuffisant volume des affaires en France donnent une certaine logique à une augmentation de salaires qui, pendant une décennie, ont été maintenus à un niveau très bas par la réduction du temps de travail. Non seulement elle nous a affaiblis économiquement, non seulement elle a conduit les salariés à faire un énorme effort de productivité qui n’a pas amélioré le climat au sein des entreprises, mais elle a contraint la plupart des employés à faire des concessions salariales pour avoir du temps libre (imposé). Les 35 heures, à tort ou à raison, ont été un formidable moyen de pression sur les salaires et ont donc gelé ou freiné les revenus en France pour un très grand nombre de salariés, sinon pour tous.
Si un effort accru des plus petites entreprises en faveur de leurs salariés semble exclu (il créerait du chômage), il n’est pas impossible pour les plus grandes, qui maintiennent les salaires à un niveau insuffisant pour rémunérer plus largement leurs actionnaires. Sans revenir sur les 35 heures, on pourrait commencer par réformer un système abusif qui méprise le travail pour protéger le capital. Langage de syndicaliste ? Peut-être. Mais il arrive souvent aux syndicats d’avoir raison.
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