DANS LE PREMIER CAS, l’accusation n’était pas dénuée de tout fondement. Daniel Cohn-Bendit a effectivement publié en 1975 un livre dans lequel il semble exprimer une inavouable affinité avec la pédophilie. Cet ouvrage a fait scandale, M. Cohn-Bendit s’en est alors expliqué et les médias sont passés à autre chose. M. Bayrou dit qu’il a lu le livre récemment, qu’il en a ressenti un malaise et que, dans le feu des accusations réciproques que les deux hommes se sont lancées lors du débat de France 2, il l’a fait savoir à son adversaire. Son score à 8,5 % (il espérait au moins 14) et l’indignation de l’opinion l’ont amené, lundi dernier, à demander qu’on l’excuse. Pour autant, on n’a pas l’impression que M. Cohn-Bendit ait renié ses écrits d’il y a trente ans. On peut donc dire que l’opinion est plus indulgente pour un homme qui témoigne de sa compréhension à l’égard de la pédophilie que pour l’homme qui le lui reproche. Sauf que le temps est passé et que les médias ont le sens de la prescription. Dans ces conditions, rappeler à un homme, pour mieux le confondre, ses idées ou ses frasques trentenaires apparaît comme un moyen peu fair play de le battre. Indiscutablement, M. Bayrou s’en est rendu compte, même si dans l’affaire il semble plus intègre que M. Cohn-Bendit.
L’agressivité ne paie pas.
C’est un élément d’appréciation que les hommes politiques doivent inclure dans leurs calculs : l’agressivité ne paie pas à la télévision et il faut se garder de transformer l’adversaire en victime apparente. Les termes blessants, même s’ils sont justifiés, nuit à celui qui les prononce. C’est tellement vrai que M. Cohn-Bendit, qui devrait rester responsable de ce qu’il publie, a été automatiquement absous par les commentateurs, lesquels se sont contentés d’insister sur le « dérapage » de M. Bayrou, comme si le dérapage antérieur de M. Cohn-Bendit n’était pas plus grave, même s’il est lointain. Certes, le lien immédiat qui a été établi entre les propos du leader du MoDem et son échec électoral n’est nullement prouvé. Il est plus probable, comme l’ont fait remarquer des instituts de sondage, que la popularité du MoDem avait baissé avant l’inciden, lequel a plutôt conforté les électeurs qui avaient décidé de prendre leurs distances. Mais il est tout à fait remarquable que la simple mention d’un fait réel (le livre de Cohn-Bendit) se retourne contre celui qui en parle.
Ce qui est choquant dans le cas de Valéry Giscard d’Estaing, c’est l’inutilité totale de sa déclaration. Elle révèle en effet une information qu’il est incapable de prouver (la contribution d’Omar Bongo à une campagne de Jacques Chirac) mais elle n’est dictée par aucun intérêt personnel sinon la démolition gratuite du personnage Chirac. Elle montre que les hommes politiques ne savent pas enterrer la hache de guerre ; que, pour se discréditer les uns les autres, ils ne sont jamais à court d’une médisance, pour ne pas dire une calomnie. Or, en s’efforçant de détruire la réputation de M. Chirac, M. Giscard d’Estaing ne peut espérer aucun avantage personnel. M. Chirac n’est plus candidat à rien et son adversaire n’a rien à lui prendre, ni suffrages ni fonctions.
Alors, pourquoi se livre-t-il à une attaque aussi vile ? Peut-être parce que les Français se sont habitués très vite au départ de M. Giscard d’Estaing de la scène politique en 1981, mais qu’aujourd’hui ils expriment une certaine nostalgie de Jacques Chirac. Âgé de 83 ans, Giscard se conduit comme un enfant jaloux des jolies billes d’un autre enfant. Du coup, il se ridiculise, il habille son élégance naturelle du vêtement malséant de la mesquinerie. C’est consternant, car il n’a même pas l’excuse d’une campagne électorale où les esprits ont tendance à s’échauffer et d’ailleurs, il n’est pas de ceux qui portent l’estocade dans un moment d’égarement. Il a pris le temps de préparer son coup de Jarnac.
Un manque de respect pour la politique.
Le pire, dans tout ça, c’est qu’il ya toujours quelque chose à dire au sujet du passé politique des uns et des autres, et donc de M. Giscard d’Estaing, qui n’a jamais bien expliqué pourquoi il avait accepté que Bokassa lui offrît des diamants, ou de M. Chirac, qui n’est pas totalement absous de diverses affaires liées à la mairie de Paris.
Un peu de jugeotte, même chez ces gens extraordinairement intelligents, les amènerait à comprendre que, s’ils ressortent des affaires qui datent de 35 ans, on peut en ressortir qui les concernent. C’est un jeu totalement destructeur pour l’agressé et pour l’agresseur. C’est aussi une façon de montrer que la haine excessive de l’adversaire politique représente un manque complet de respect pour la politique et pour les institutions. À noter que l’histoire fera son œuvre et qu’on saura tout sur tout le monde quand les historiens auront accompli leur travail scientifique. Mais on le saura quand, justement, aucune passion personnelle ne se mêlera aux révélations.
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