Qui aurait cru, il y a encore quelques années, que le pharmacien pourrait un jour vacciner ses patients au sein même de l'officine ?
Cette mission, auparavant réservée aux médecins et aux infirmiers (sous certaines conditions), est aujourd'hui largement pratiquée par le pharmacien. Une étude commandée par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) met en exergue la montée en flèche de la couverture vaccinale depuis que les pharmaciens sont autorisés à exercer cette mission. « En 2019, 5 millions de Français étaient vaccinés contre la grippe. En 2020, grâce au concours des pharmaciens, plus de 6 millions de personnes ont pu être vaccinées contre ce virus », note Philippe Besset, président de la FSPF. Après le succès de la vaccination antigrippale en officine, celle contre le Covid - possible en officine depuis le 15 mars dernier - est également prometteuse. De fait, selon les données GERS Data, plus de 6 % des vaccinations anti-Covid en France ont été effectuées en officine, soit 1 million de personnes sur les 16 millions ayant reçu au moins une dose. Les pharmacies volontaires en matière de vaccination peuvent, d'ailleurs, se faire référencer sur la plateforme Santé.fr pour informer les patients de ce service.
Prévenir le rebond des maladies infectieuses
Que de routes parcourues par l'officinal… mais le défi ne s'arrête pas en si bon chemin. « Aujourd'hui, personne ne peut remettre en cause les compétences du pharmacien en termes de vaccination. Nous devons continuer sur cette lancée pour lui permettre de vacciner ses patients contre d'autres pathologies », souligne Jérôme Paresys-Barbier, président de la section D de l'Ordre national des pharmaciens. Diphtérie, tétanos, poliomyélite, varicelle, coqueluche, oreillons… les grands « classiques » de la vaccination ne sont pas toujours à jour, au sein de la population adulte. Ces carences vaccinales peuvent avoir des conséquences graves au niveau individuel et collectif, en faisant flamber des pathologies que l'on croyait disparues. En témoigne le retour en force de maladies telles que la coqueluche ou la rougeole, par exemple. « Nous sommes à la veille d'une catastrophe : celle du rebond des maladies infectieuses. La population ne se vaccine plus ! Le pharmacien devrait avoir pour rôle de rappeler le calendrier vaccinal, de vérifier qu'il est à jour pour chaque patient et, le cas échéant, de proposer de le vacciner », indique Philippe Besset.
Un avis partagé par Gilles Bonnefond, conseiller du président et porte-parole de l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO) : « si on veut gagner la bataille de la prévention contre ces pathologies, on doit associer tous les acteurs de santé. Ce n'est pas en réservant l'activité de vaccination à la médecine libérale que l'on va y arriver. Cela fait 10 ans que nous nous battons pour que les pharmaciens puissent effectuer tous types de vaccins. »
Vers une prescription officinale ?
Une bataille qui devrait bientôt porter ses fruits. De fait, l'extension des missions vaccinales des officinaux est actuellement un sujet en discussion à la Haute Autorité de santé. « La commission technique des vaccinations devait se prononcer en 2020 sur le sujet. Mais le Covid a retardé les discussions », précise Philippe Besset. Pour sa part, le président de l'USPO se veut optimiste, « un arrêté devrait être prochainement publié pour autoriser le pharmacien à vacciner tous les adultes et les adolescents afin de faire respecter le calendrier vaccinal ».
En attendant, existe-t-il des obstacles susceptibles de limiter l'extension des missions vaccinales des officinaux ? Pour Philippe Besset, « les professionnels de santé devraient disposer d'un système d'information commun permettant de vérifier l'état vaccinal du patient. Cet outil indispensable pourrait être intégré au dossier médical partagé (DMP), par exemple ». Jérôme Parésys-Barbier, quant à lui, ne perçoit pas d'obstacles, « dans la mesure où le pharmacien, formé à la vaccination, est tout à faire capable d'assurer cet acte de prévention ».
La question de la prescription de vaccins par l'officinal doit également se poser. « La primo-vaccination doit être prescrite par le médecin. Mais je ne vois pas pourquoi le pharmacien ne pourrait pas proposer à un patient adulte de faire un rappel du DTP, par exemple, lorsque cela s'avère nécessaire. Quand l'extension vaccinale sera en vigueur, nous pourrions lancer une campagne de communication nationale pour inciter les Français à faire le bilan de leur état vaccinal chez le pharmacien », conclut-il.
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