Rarement négociations auront débuté sous de meilleurs auspices. Le Congrès national des pharmaciens, qui s’est tenu le week-end dernier à Lyon, a prouvé s’il en était besoin que les efforts consentis tout au long de la crise par la profession sont parfaitement reconnus par les pouvoirs publics. Bien que Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) regrette que le ministre de la Santé n’ait pu faire le déplacement, il salue son discours vidéo et se réjouit de son message clé qui confirme le début des négociations en novembre.
Olivier Véran promet une lettre « ambitieuse » qui va donner un « rôle pivot » au pharmacien en termes de santé publique et mettre « l’accent sur l’importance du rôle de proximité des pharmaciens, notamment, mais pas que, dans les zones sous-denses (…) où la présence médicale est insuffisante, et dans les zones rurales ». Surtout, il souhaite « accroître son rôle de prévention, qu’il s’agisse de compétences vaccinales et de dépistage, ou dans le bon usage des médicaments, des biosimilaires et des dispositifs médicaux ». Le ministre promet même que les réflexions qui seront menées sur ces sujets « se feront dans l’intérêt des patients et de notre système de santé (…) et surtout loin des corporatismes et des idées préconçues ».
Pour des compétences vaccinales élargies
Le grand débat qui a précédé l’intervention ministérielle, entre Philippe Besset et le directeur de l’assurance-maladie, Thomas Fatôme, confirme ces ambitions. « La crise a montré à quel point les pharmaciens peuvent être des acteurs de prévention. Pour l’assurance-maladie, ça a été une sorte de révélation de ce que vous pouvez faire », a-t-il reconnu devant une salle comble. Convaincu qu’il faut « capitaliser sur ce que nous avons fait ensemble », Thomas Fatôme a déjà des idées sur les futures missions conventionnelles. Par exemple avec l’implication du pharmacien dans le dépistage du cancer colorectal, pour lequel la France affiche un retard accentué par la crise. Pour cette mission, Philippe Besset défend une rémunération partielle dès l’intervention du pharmacien et une rémunération complémentaire en fonction du taux de réussite de l’opération.
Thomas Fatôme cite également « tout ce qui est test de dépistage rapide » et « bien sûr, la vaccination » dans les actes qu’il veut confier au réseau. Il se réjouit de l’extension de la vaccination antigrippale en officine aux publics non prioritaires et veut « aller plus loin », mais n’a « pas tous les leviers en main », certaines prérogatives relevant du ministère de la Santé ou de la Haute Autorité de santé (HAS). Une chose est sûre, « l’assurance-maladie est très favorable à l’élargissement du rôle du pharmacien dans la vaccination, par exemple aux rappels de l’adulte ». Une revendication de la FSPF qui, souligne Philippe Besset, « répète depuis deux ans que la pharmacie doit être le lieu de la prévention ». De son côté, l’assurance-maladie se veut pragmatique : « On met face à face les compétences des professionnels de santé et les besoins des patients. On doit pouvoir autoriser les pharmaciens à faire davantage de vaccinations parce que les médecins généralistes ont autre chose à faire compte tenu de la démographie médicale. »
Simplifier les procédures
Les prochaines négociations seront l’occasion pour les syndicats et l’assurance-maladie de « partager ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas », Thomas Fatôme insistant sur la mise en place de missions applicables à tous les patients et par tous les pharmaciens sur le territoire. Sur ce point, Philippe Besset défend lui aussi l’importance du déploiement des nouvelles missions par l’ensemble du réseau et regrette l’engagement limité des confrères dans les bilans de médication partagés… en raison d’un manque de moyens engagés par les autorités et le besoin de simplifier la procédure. Une simplification qui devrait passer par les améliorations des logiciels métier prévus dans le Ségur du numérique.
Le numérique est un axe d’importance pour la CNAM, couvrant la e-prescription, l’espace numérique en santé, la e-CPS, la transformation des logiciels métier… Car les pharmaciens ont besoin que leur LGO s’adapte à leurs nouvelles pratiques. « Nous travaillons actuellement avec des logiciels de vente mais l’évolution du métier depuis 2012 nécessite que notre outil informatique soit centré sur le patient », explique Philippe Besset. Olivier Véran a d’ailleurs insisté sur ses attentes d’un engagement fort des pharmaciens dans le numérique et rappelé l’importance d’une « meilleure communication des acteurs du parcours patient grâce à la messagerie sécurisée ou aux agendas partagés ». Il a promis 2 milliards d’euros sur 3 à 5 ans pour équiper la ville, l’hôpital et le médico-social. Une adaptation d’autant plus nécessaire que l’exercice coordonné reste la nouvelle règle. Philippe Besset demande néanmoins un délai supplémentaire de deux ans concernant l’entrée des pharmaciens dans l’exercice coordonné, soit une échéance au 31 décembre 2024. Car avec la crise du Covid, « la confection des CPTS, malgré l’engagement des pharmaciens, a pris du retard ». Une demande à laquelle l’assurance-maladie n’a pas répondu dans l’immédiat.
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