À l’heure où nous écrivions ces lignes, les pharmaciens se préparaient à baisser le rideau, descendre dans la rue et faire entendre leur voix. Si les raisons poussant les officinaux à se mobiliser sont nombreuses : préservation du maillage officinal, revalorisation des honoraires des nouvelles missions, lutte contre les pénuries, crainte de la libéralisation de la vente en ligne de médicaments… le message est-il bien passé auprès de leurs patients ?
Avant que les médias généralistes ne se saisissent de l’événement, le message n’était pas passé du tout. Ainsi, lorsque nous les avons interrogés en début de semaine dernière à la sortie de pharmacies grévistes, c’est plutôt la surprise qui se lisait dans le regard des clients, qui semblaient tout ignorer de la mobilisation à venir. Un électricien se hasardait : « Vos pharmaciens, ils veulent manifester contre la loi sur l’aide à mourir et la distribution des pilules létales, n’est-ce pas ? »
Des patients compréhensifs
Mais mercredi, à la veille de la journée de grève, les Français semblaient déjà mieux informés, preuve du rôle déterminant des médias pour donner de la visibilité à la profession. Dans l’ensemble, ils se disent plutôt compréhensifs à l’égard de la mobilisation : « Ce qui aurait été plus intéressant pour eux, c’est de ne plus vendre de génériques pendant une semaine, voire un mois. Là, je pense que la sécu, elle leur donnerait tout ce qu’ils veulent ! », ricane un étudiant. Un commercial dit, lui, approuver la grève, même s’il doute qu’elle poussera le gouvernement à agir, notamment contre les pénuries.
Des raisons invoquées, c’est de loin la lutte contre la libéralisation de la vente en ligne de médicaments qui trouve le plus fort soutien : « Ils ont tout à fait raison de protester contre, estime une jeune mère de famille. Si on laisse Amazon vendre des médicaments, ils prendront tout le marché, et je ne suis pas sûre qu’ils respecteront la confidentialité des données. Et si une multinationale américaine peut vendre des médicaments, alors l’État n’aura aucun argument à opposer aux grandes boîtes comme Carrefour ou Leclerc. Ce sera un vrai danger de santé publique. » Près d’elle, une retraitée prend la parole : « Je préfère qu’ils fassent grève pour ce genre de raison que pour réclamer plus d’argent comme le font certaines professions que je ne nommerais pas ! »
Restent toutefois quelques sceptiques. Pour une cliente, interpellée au sortir d’une officine et coiffeuse de profession, « Les raisons invoquées paraissent nobles, mais quelle est la motivation profonde derrière tout ça ? Leur demande de revalorisation pour les conseils, au final, c’est bien la preuve que tout ça, c’est pour leur argent, et pas pour nous ». Grévistes ou non, pour expliquer et convaincre sur les raisons de leur mobilisation, les pharmaciens ont encore bien du boulot…
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