En France, 20 millions de personnes déclarent souffrir des jambes, et près de 10 millions de patients seraient susceptibles de porter un dispositif de compression médicale. Plus féminine (une femme sur deux) que masculine (un homme sur quatre), cette population, au global très importante, n'est guère portée à la consultation médicale puisque l'on estime à 30 % seulement le nombre de patients traités pour une maladie veineuse.
« Beaucoup de personnes ne sont pas prises en charge car elles ignorent que les symptômes dont elles souffrent sont dus à l'insuffisance veineuse », remarque Constance Meynard, chef de gamme Radiante/Jobst chez BSN Radiante. Les premiers signes d'une insuffisance veineuse sont en effet multiples et différents selon les individus : jambes lourdes qui se traduisent par un effet de pesanteur, douleurs parfois lancinantes qui sont ressenties comme une sensation de gêne ou de fatigue, impatiences qui correspondent à un besoin irrépressible de bouger les jambes, démangeaisons.
Face à ces différentes manifestations, le premier réflexe du public est souvent d'appliquer un gel rafraîchissant. « Si les symptômes persistent, il ira consulter un médecin généraliste qui prescrira plus souvent un veinotonique que des bas de compression. » Le recours à la compression n'intervient qu'en bout de parcours mais, une fois la prescription effectuée, le patient ne se précipite pas pour se procurer son traitement. « Il attendra en moyenne quatre mois après la première prescription pour aller chercher ses bas. » Un atermoiement qui s'explique par l'existence d'un frein majeur lié au port des dispositifs de contention. En effet, ces derniers souffrent encore d'une image vieillotte et sont souvent considérés comme des vêtements inconfortables « qui serrent et qui grattent ». Pour contrer cette réputation considérée comme injustifiée par les fabricants, ces derniers se mobilisent.
Informer
BSN Radiante utilise l'humour pour communiquer aux moyens de visuels qui mettent en scène des personnages modernes accompagnés de slogans percutants : « Qui a dit que la compression était triste ? » et « Les grands-mères ont changé, leurs bas aussi ! ». À l’origine des gammes Radiante et Jobst, l'entreprise insiste sur l'importance du traitement et de son observance. Pour l'encourager, elle mise notamment sur ses systèmes antiglisse JarFix et BasFix et la diversité des modèles de ses gammes Voilisim, MicroVoile, Sensation, Qoton, Détente pour les femmes, et Styl'Coton, Styl'Coton fine destinées aux hommes.
Pour Charles Dubourg, dirigeant de Cizeta Medicali, la cause principale du déficit d'observance est le manque d'éducation thérapeutique. Il a donc mis en œuvre une application, Smapp Observance, qui informe sur la maladie veineuse, explique comment enfiler ses bas de compression et délivre des conseils d'hygiène de vie pour lutter contre la stase veineuse. Proposée à toute acheteuse d'un dispositif Varisan des gammes Ethéré (12 couleurs, 36 tailles de séries), Diva (maille transparente pour l'été), Seta (maille en soie pour les problèmes de troubles trophiques et les allergies) et tout acheteur d'un article de la gamme Passo (en soie et sans coutures), l'application possède un volet (Smapp Référence) à destination des pharmaciens pour les aider à gérer leur stock. « À l'officine, le temps de prise en charge d'un patient à appareiller est en moyenne de 7,5 minutes, alors qu'il devrait être de 20 minutes, prise de mesure, essayage et éducation thérapeutique inclus », indique Charles Dubourg. Pour mettre en valeur la compression veineuse en pharmacie, il va équiper certaines officines d'un « bar initiatique » dès le mois de mars. Ce nouveau type de corner, équipé d'outils connectés, a pour but de présenter les produits dans leur diversité, d'expliquer leur mode d'action, tout en insistant sur l'intérêt de les associer à un veinotonique. « Le marché de la compression possède un potentiel de développement important en raison du faible nombre de personnes traitées dans la population des patients. » Caractérisée par une belle stabilité liée au nombre de paires limitées à la prescription (quatre paires par personne et par an, jusqu'à 8 paires tolérées), la demande devrait naturellement croître sous l'effet du vieillissement de la population. « C'est surtout le recrutement de nouveaux patients qui permettra au marché de se développer. C'est pourquoi il faut communiquer sur la maladie, ses premiers signes et ses traitements. »
Savoir faire
Communiquer, certes, mais en premier lieu vers les profils à risque comme les femmes enceintes et les personnes âgées, précise-t-on chez Thuasne. Une démarche qui incombe au pharmacien dès que se présente une demande pouvant relever d'un cas d'insuffisance veineuse, jambes lourdes ou mal des transports… « L'enjeu c'est l'éducation et l'information du patient, poursuit Roxane Maes, responsable du pôle des maladies veineuses chez Thuasne. Un gros travail sur les matières, les modèles, le maintien a été réalisé par les fabricants pour aboutir à des dispositifs proches des produits de ville. Il faut le faire savoir. » Le fabricant lance la gamme Venoflex Secret Opaque en complément des lignes Secret Semi-transparent, Fast (chaussettes de compression étudiées pour faciliter le port et l'enfilage) et Incognito Absolu fondée sur la transparence.
Chez Sigvaris, qui s'apprête à lancer de nouvelles gammes, on trouve des lignes destinées aux hommes - à base de matière naturelle (Bambou, Origin Lin, Instinct Coton, Laine), pour un usage quotidien (Graphik, Urban, Initial), de classe 3 (Expert)- ainsi qu'aux femmes - à base de matière naturelle (Bambou, Origin Lin, Soyance, Kylma, Coton), à motif (Intrigue, Attrait, Rythmic, Audace), du transparent à l’opaque (Divin Eclat, Diaphane, Opalis), de classe 3 (Expert).
Gibaud, pour sa part, référence une gamme premium Optimum Tech (pointe de pied sans couture, semelle aérée et massante), une gamme transparente (Lux) et présente en édition limitée les chaussettes Chat dans la ligne Confort Tech Women, tandis que Medi lance la gamme Mediven Karesse qui vient compléter l'offre existante en mettant en avant la douceur et la transparence.
Un autre facteur, selon Innothera, pourrait favoriser l'observance. Le laboratoire cite une étude qui révèle qu'un patient sur trois ne suit pas régulièrement son traitement seulement 15 jours après l'achat. « C'est révélateur d'une insatisfaction qui peut avoir des origines diverses, que le produit soit inconfortable, qu'il comprime trop la jambe, qu'il ne soit pas adapté à la morphologie de la personne, ou encore qu'il ne corresponde pas à ses habitudes vestimentaires », explique Nathanaël Molard, responsable marketing des gammes Varisma pour femmes et Legger pour hommes. Une dernière hypothèse qui a attiré l'attention du fabricant. « Cette question était peu appréhendée par les acteurs du marché et elle nous a interpellés. » Une étude a donc été menée afin de comparer le type d'achat effectué par les femmes en matière de collants et de bas sur le marché de ville et sur celui de la compression/contention. Seulement 3 % des ventes de textiles chaussants sont consacrées aux bas auto-fixants dans le commerce, alors qu'ils représentent 48 % des délivrances en compression médicale. Pour Innothera, la conclusion est sans appel : le format vendu à la patiente pour insuffisance veineuse ne correspond pas à ce qu'elle a l'habitude d'acheter. Et ce sont les collants qui ont la préférence des femmes en ville. Le laboratoire s'est donc lancé dans l'élaboration d'un collant de compression qui ne soit pas difficile à enfiler tout en assurant un bon maintien, qui soit confortable au niveau de la ceinture et qui corresponde à la majorité des silhouettes (98 % des morphologies, bassin compris). Cette nouvelle marque, Smartleg, a été lancée en septembre 2017. « Elle a connu un franc succès puisque nous avons rempli 4 fois les objectifs fixés. En plus, nous disposons d'un potentiel de progression sur ce créneau puisque les collants ne représentent que 12 % à 14 % des ventes de dispositifs de compression en pharmacie ! »
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