Cas de comptoir
Le contexte :
« J’ai de plus en plus de pellicules. Elles tombent sur mes épaules, j’ai honte face à mes collègues mais difficile de les cacher ! »
Les questions à poser :
« Êtes-vous particulièrement stressé ou fatigué ? Portez-vous des bandeaux, bonnets… pour les cacher ? Utilisez-vous des laques, cires coiffantes… ? Faites-vous des colorations ? Quel shampooing utilisez-vous ? À quel rythme ? »
Quelques définitions
Les pellicules sont la traduction d’une desquamation excessive, banale, chronique et fluctuante du cuir chevelu, avec des périodes de rémission et des périodes de récidive. Elles représentent l’une des formes cliniques de la dermite séborrhéique.
La dermite séborrhéique (aussi appelée dermatite séborrhéique), se manifeste par des états pelliculaires secs ou gras du cuir chevelu, par un eczéma érythématosquameux des plis du visage, des sourcils, des régions rétro-auriculaires, de la lisière des cheveux, du dos…
La dermite séborrhéique du cuir chevelu, aussi appelée Pityriasis capitis (Pityrosporum étant l’ancien nom de Malassezia furfur), ou état pelliculaire du cuir chevelu, s’observe chez plus de 70 % des patients atteints de dermite séborrhéique. Elle touche 50 % des adultes de plus de 20 ans, avec une large prédominance masculine.
Malassezia furfur est une levure faisant partie de la flore commensale cutanée. Sa densité augmente avec la sévérité d’un état pelliculaire. Elle est associée aux zones du corps riches en sébum.
Les « simples » pellicules sèches sont les pellicules les plus courantes : ce sont ces fameuses pellicules que l’on retrouve sur les épaules. Elles peuvent être présentes au niveau des cuirs chevelus qui manquent de sébum (cuir chevelu sec), mais aussi en fonction d’autres facteurs. Elles sont plus petites que les pellicules grasses, tombent “comme de la neige” sur les épaules en se coiffant ou en mettant les mains dans les cheveux. Elles ne sont pas (ou peu) accompagnées d’inflammation et/ou de prurit.
Les pellicules sont la traduction d’une desquamation excessive, banale, chronique et fluctuante du cuir chevelu
Les pellicules grasses sont davantage présentes sur les cuirs chevelus gras, et se distinguent par leur taille car elles s’amassent avec le sébum et s’enlèvent difficilement du cuir chevelu. Elles sont généralement de couleur jaune, grasses et épaisses. Le cuir chevelu est souvent irrité, rose, et démange. Elles peuvent causer des démangeaisons et favoriser la perte de cheveux. Les pellicules peuvent avoir un retentissement important sur la vie sociale du patient qui ressent une gêne, voire une honte.
Un peu de physiopathologie
Longtemps, on a pensé que les pellicules étaient le résultat d’une hyperprolifération épidermique sans lien avec Pityrosporum. On se disait que les pellicules sèches n’étant pas associées à une inflammation, les pellicules en général étaient indépendantes d’une dermite séborrhéique. On se disait aussi que la dermite séborrhéique était marquée par des poussées alors que les pellicules étaient un processus stable jusqu’à ce que l’activité proliférative de l’épiderme diminue chez les sujets âgés.
Depuis, l’utilisation d’antifongiques s’étant révélée efficace sur les pellicules et sur la dermite séborrhéique, on considère désormais que les états pelliculaires font partie des formes cliniques de la dermite séborrhéique.
Schématiquement, on distingue trois éléments responsables d’un état pelliculaire : du sébum en excès, qui engendre une prolifération de Malassezia furfur, et une inflammation.
Dans l’état pelliculaire, on observe une maturation anormale de la couche cornée de l’épiderme avec une parakératose en certains endroits, et quelques microfoyers inflammatoires dans le derme papillaire. Ce sont ces zones inflammatoires qui peuvent générer un prurit et une sensation de brûlure.
Les lésions siègent particulièrement là où la densité en levures de type Malassezia furfur est élevée, et leur intensité est proportionnelle à cette densité. En chiffres : la quantité de levures Malassezia serait multipliée par deux par rapport à celle retrouvée chez les sujets indemnes de pellicules. Ces levures prolifèrent dans les zones riches en sébum.
Les pellicules ne doivent pas être confondues avec les lentes de la pédiculose (les lentes vivantes sont ovoïdes, gris blanchâtres, et fixées à moins de 5 mm de la racine du cheveu, principalement au niveau des régions pariétales et au-dessus des oreilles. Les lentes mortes prennent une couleur blanchâtre et s’éloignent du cuir chevelu).
Les mots du conseil
Quels sont les facteurs favorisant l’apparition de pellicules ?
Autour du conseil, on pensera notamment à l’influence du stress ou de la fatigue, aux produits coiffants ou agressifs pour le cuir chevelu, à la consommation d’alcool ou de tabac.
Mais on n’oubliera pas les autres facteurs sur lesquels on ne peut agir comme les variations de climat (les poussées sont plus importantes en période hivernale et lorsque l’air est humide ; à l’inverse, une amélioration est constatée en été) ou une prédisposition génétique.
Combattre les idées reçues
- Non, les pellicules, ce n’est pas une question d’hygiène !
- Non, il n’est pas nécessaire de faire un shampooing tous les jours : au contraire limiter le shampooing à un jour sur deux au maximum afin de ne pas irriter le cuir chevelu.
- Ne pas utiliser de shampooing pour bébé, qui n’est pas adapté au cuir chevelu de l’adulte !
« J’ai des pellicules dans ma barbe… »
Les pellicules de la barbe ont la même origine que les pellicules du cuir chevelu. Elles sont également dues à une présence accrue de levures de type Malassezia et à une prédisposition génétique qui induisent une accélération du processus de renouvellement et de desquamation de la peau. Pour l’homme qui ne souhaite pas couper sa barbe, on peut utiliser comme pour le cuir chevelu un shampoing antipelliculaire pour la barbe afin d’éliminer les pellicules.
Masser le cuir chevelu
Réaliser des mouvements circulaires au niveau du cuir chevelu (de la nuque vers le sommet du crâne) permet de stimuler la microcirculation sanguine. On peut y associer de l’huile d’amande douce ou de coco.
Hygiène de vie
On conseillera d’éliminer les facteurs de stress et d’augmenter la quantité de sommeil car la fatigue et le stress sont des facteurs favorisant l’apparition de pellicules.
De même, on peut conseiller de réduire la consommation d’alcool et de tabac.
Limiter certains produits coiffants
En particulier, attention aux colorations, décolorations, défrisages, lissages… agressifs pour le cuir chevelu. Limiter aussi l’utilisation de gels, de cires, de laque, de sèche-cheveux trop chaud…
Éviter aussi de trop porter des accessoires tels que chapeaux, bonnets, bandeaux… Au contraire laisser « respirer » le cuir chevelu à l’air libre !
La fatigue et le stress sont des facteurs favorisant l’apparition de pellicules
Shampooings ou lotions ?
La lotion antipelliculaire est en général un complément au shampooing traitant. Elle s’utilise entre les shampooings pour maintenir la lutte contre Malassezia Furfur !
Les produits conseils
Lorsque l’atteinte pelliculaire est sévère, on pourra orienter le patient vers une consultation médicale pour une prise en charge plus globale (diagnostic de dermatite séborrhéique) avec prescription pour le cuir chevelu de kétoconazole (utilisation deux fois par semaine) ou encore de ciclopiroxolamine (utilisation deux fois par semaine).
Lorsque l’atteinte est plus légère, le pharmacien dispose d’un arsenal important pour aider son patient à se débarrasser de ses pellicules. Les shampooings traitants s’initient en général à un rythme de deux à trois fois par semaine, et peuvent être relayés avec un shampooing doux. En général, on recommande un traitement d’attaque (avec association d’actifs, ou actifs plus concentrés) de quelques semaines avant d’opter pour un traitement relais plus doux ou plus espacé. Si les pellicules sont sèches, il est parfois conseillé de privilégier un rinçage à l’eau tiède tandis que si elles sont grasses, il est conseillé de privilégier un rinçage à l’eau fraîche.
Les exfoliants
Certains soins capillaires antipelliculaires contiennent des microexfoliants pour exfolier et affiner les pores : c’est le cas du LHA de Kerium.
0,5 à 3 % d’acide salicylique sont présents dans la formule des shampoings antipelliculaires
Les kératolytiques ou kératoréducteurs
Parmi les kératolytiques, l’acide salicylique est présent dans les shampooings antipelliculaires à des concentrations de 0,5 à 3 %. Par son action kératolytique, il solubilise le ciment intercellulaire, ce qui diminue la cohésion des cornéocytes et permet d’éliminer les cellules mortes et de stimuler le renouvellement cellulaire. Il agit en même temps sur les démangeaisons.
Parmi les kératoréducteurs : l’huile de cade, qui vient de la distillation du bois de genévrier, et agit aussi sur les démangeaisons.
Les antifongiques contre Malassezia furfur
La ciclopiroxolamine et la piroctone olamine (qui est de la même famille que la ciclopiroxolamine) agissent en inhibant le captage et l’incorporation de substrats nécessaires à la croissance et au métabolisme de Malassezia furfur.
Le sulfure de sélénium a des propriétés antifongiques, grâce à un effet cytostatique au niveau de l’épiderme et de l’épithélium folliculaire, provoquant une diminution de l’adhérence cornéocytaire et ainsi une élimination du champignon de la couche cornée. Attention à l’irritation cutanée et à la séborrhée réactionnelle en cas d’utilisation prolongée. Le disulfure de sélénium combine le soufre aux propriétés purificatrices et le sélénium.
Le climbazole ou encore le lactate de zinc sont aussi utilisés pour leur action sur Malassezia furfur.
Qu’en savez-vous ?
1. Les états pelliculaires :
a) sont une des manifestations de la dermatite séborrhéique ;
b) touchent 30 % des patients souffrant de dermatite séborrhéique ;
c) sont liés à Malassezia furfur.
2. Les pellicules :
a) peuvent être responsables d’un prurit ;
b) peuvent être responsables de rougeurs ;
c) n’engendrent jamais de gêne.
3. Que faut-il aborder lors d’une plainte de pellicules ?
a) le stress ;
b) la consommation de tabac ;
c) les produits coiffants.
4. Parmi les actifs présents dans les shampooings :
a) la piroctone olamine a une action antifongique ;
b) l’acide salicylique a une action kératolytique ;
c) le sulfure de sélénium a une action kératolytique.
5. Les antifongiques antipelliculaires :
a) sont utilisés pour leur action sur Malassezia furfur ;
b) sont utilisés pour leur action sur Candida albicans ;
c) sont représentés par la famille de la ciclopiroxolamine.
Réponses : 1. a) et c) ; 2. a) et b) ; 3. a), b) et c) ; 4. a) et b) ; 5. a) et c).
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