Qui est-elle ?
La « préparation éventuelle des doses à administrer » (PDA) consiste à préparer, dans le cas où cela contribue à une meilleure prise en charge thérapeutique du patient, les doses de médicaments à administrer, de façon personnalisée, selon la prescription, et donc par anticipation du séquencement et des moments des prises, pour une période déterminée.
Elle est inscrite dans l’article R4235-48 du CSP comme partie de l’acte de dispensation, avec l’analyse de l’ordonnance et les informations et conseils nécessaires au bon usage du médicament. Ce qui est encore très attendu aujourd’hui est son encadrement réglementaire, régissant des recommandations de bonnes pratiques, une rémunération, une convention-type entre les EHPAD et les officines… Les pharmaciens s’appuient aujourd’hui sur des supports, des check-lists et des guides élaborés par les différentes ARS pour homogénéiser au mieux la pratique (celui qui sert souvent de référence est le guide réalisé par l’ARS PACA en 2017).
Quelle est la tendance actuelle ?
Indéniablement, le vieillissement de la population, avec une augmentation de la polymédication, rend la PDA de plus en plus utile, avec une réduction du risque médicamenteux (estimée entre 30 et 54 %), une amélioration de l’observance médicamenteuse et une efficience médico-économique à large échelle.
Pourtant, aujourd’hui, parmi les pharmaciens qui s’étaient lancés dans la PDA à destination des EHPAD, une partie d’entre eux a renoncé. Les raisons à ce revirement de situation sont multiples :
Le contexte salarial : l’activité nécessite du temps, non compatible avec la difficulté croissante de recrutement des préparateurs ; le choix de s’orienter vers d’autres nouvelles missions en lien avec l’évolution du métier ; l’absence d’une rémunération actée, qui nécessite de bien peser le pour et le contre et de réaliser une étude de marché approfondie. Pour pouvoir rendre viable la PDA dans leur officine, certains pharmaciens, dans leur convention avec les EHPAD, actent une participation au consommable de l’EHPAD et/ou des résidents. C’est aussi le cas dans la PDA ambulatoire (même si celle-ci reste encore anecdotique, et plutôt sur demande d’un patient auprès de son pharmacien). D’autres pharmaciens, plus majoritaires, proposent une gratuité du service mais misent sur l’augmentation et la fidélisation de la patientèle, l’augmentation du volume de médicaments achetés.
Le renoncement de certains à la PDA a redistribué les cartes et concentré l’activité vers des officines, qui, à l’inverse, l’ont déployée. C’est le cas d’une pharmacie à Lorient, qui, aujourd’hui prépare de façon automatisée les piluliers plusieurs EHPAD et foyers pour handicapés. Typhaine Le Roux, pharmacienne co-gérante, souligne : « Nous avons débuté la PDA en 2015, à la fois pour renouveler l’activité dans l’officine lors d’une période de travaux dans le quartier, mais aussi pour répondre à une demande d’établissements pour qui la PDA gérée par l’officine était un moyen de recruter et de maintenir leurs infirmier-ère-s. Puis l’arrêt de la PDA par d’autres officines nous a amenés naturellement à développer l’activité. » Avec aujourd’hui 700 patients ou résidents bénéficiant de la PDA, tout est question d’équilibre et d’organisation : « Tous les salariés de l’officine participent à l’activité de PDA afin de varier l’activité pour tous et de gérer les absences. L’activité représente 1 ETP pharmacien et 1 ETP préparateur. » En termes de coût, la pharmacie demande une contribution aux établissements pour le consommable qui s’élève à 60 euros par résident par an.
Quelle PDA choisir aujourd’hui ?
Le choix dépend bien sûr du nombre de patients concernés, du nombre de spécialités, du budget d’investissement, de l’équipement informatique.
La PDA peut être manuelle, semi-automatisée (la méthode est manuelle, mais assistée par ordinateur avec un logiciel de gestion), ou automatisée (l’automate produit des sachets ou piluliers nominatifs par patient et par prise, monodoses ou multidoses).
Pérenniser le poste d’un préparateur sur cette mission semble être un défi essentiel pour maintenir la PDA
Mme C., pharmacienne assistante en Bretagne, expérimente la PDA automatisée depuis plus de 10 ans : « Aujourd’hui, une préparatrice est à temps plein sur le poste de PDA, pour assurer l’approvisionnement d’un EHPAD de 200 résidents, avec un roulement défini à la semaine pour les différents services. Ce choix de poste fixe de préparateur, sans rotation de personnel, offre un gain de temps car celui-ci connaît parfaitement les formes et les couleurs des comprimés ! Son ancienneté est aussi un gage de qualité », souligne la pharmacienne.
Pérenniser le poste du préparateur sur ce poste semble donc être un défi essentiel pour maintenir la PDA. Un défi pris en compte par la société Oreus, avec son robot Bliss-care (semi-automatisé), proposé aujourd’hui à près de 900 pharmacies : « En déblistérisant et en remplissant les piluliers compartimentés automatiquement, notre robot contribue au confort de l’opérateur et permet donc au pharmacien de fidéliser son personnel, souligne Émilie Taranger, responsable marketing et communication chez Oreus. De plus, il permet d’uniformiser la productivité, tous les opérateurs n’ayant pas la même dextérité. »
Quelle procédure-qualité ?
Face aux enjeux de la PDA, il est plus qu’utile de s’inscrire dans une démarche qualité de certification. C’est ce que confirme Martine Costedoat, directeur général de Pharma Système Qualité : « la PDA est identifiée comme une " activité à risque " en l’absence d’encadrement réglementaire. D’après une autoévaluation sur l’année 2023, 31 % de nos pharmaciens certifiés réalisent de la PDA, alors que la moyenne nationale se situe sous les 20 %. » Et pour cause : adhérer à une démarche qualité permet au pharmacien de s’appuyer sur des fiches de gestion de projet en amont, de s’appuyer sur un guide spécialement dédié aux bonnes pratiques de PDA (déconditionnement, reconditionnement, retrait de lots, enregistrement des dysfonctionnements…), de disposer de conventions types et d’améliorer la démarche qualité avec les autres professionnels concernés (via une visite initiale l’EHPAD, via un pharmacien référent, via des réunions régulières avec l’EHPAD, via des analyses de risque…).
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