Créées par la loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016, les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) représentent pour beaucoup l’outil parfait pour répondre aux besoins sanitaires, sociaux et médico-sociaux d’une population sur un territoire donné. C’est en tout cas ce que le président de la République Emmanuel Macron a exprimé lors de sa présentation de la réforme de santé le 18 septembre dernier, appelant à ce que les CPTS couvrent « tout le territoire dès 2021 ». Une information complétée par la ministre de la Santé Agnès Buzyn : l’objectif est d’atteindre les 1 000 CPTS et les 100 000 patients d’ici à 2022.
Des chiffres tout à fait réalisables selon Claude Leicher, président de la Fédération des CPTS : « J’ai connu le développement des maisons de santé, je vois la dynamique des CPTS et je constate que ça va beaucoup plus vite. Créer une CPTS, c’est techniquement plus facile, mais psychologiquement plus compliqué. » Déjà très attaché à la structuration des soins primaires sur les territoires lorsqu’il présidait le syndicat MG France, il va pouvoir passer à la vitesse supérieure à la tête de la FCPTS. D’après lui, on compterait actuellement 300 CPTS déclarées, 200 CPTS ayant un réel projet de santé dont 80 déjà en fonctionnement.
Patient, patientèle, population
Claude Leicher rappelle les trois niveaux d’intervention des professionnels de santé : le patient, la patientèle, la population. « Face au patient, les professionnels de santé ont un regard global sur la personne et sa pathologie. La patientèle, ce sont les patients avec lesquels on construit une relation habituelle, parce qu’il y a des soins infirmiers ou de rééducation par exemple. La population, ce sont les patients d’un secteur et pas seulement les nôtres. Ce sont par exemple les patients qu’un médecin ou un pharmacien reçoit lorsqu’il est de garde, cela comprend donc ses patients habituels mais aussi d’autres patients du secteur. » Et c’est sur ce 3e niveau « populationnel » que les professionnels de santé sont encore peu investis, selon Claude Leicher. Mais les CPTS pourraient bien changer la donne, « parce qu’on part justement du besoin du territoire, du besoin populationnel », explique Sophie Sergent.
Pharmacienne installée dans les Hauts-de-France et membre du bureau national de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), Sophie Sergent sait de quoi il retourne puisqu'elle a, elle-même, créé une CPTS en avril dernier, « après un an et demi de travail ». Outre le projet de santé, les limites du territoire et la population cible qu’il faut définir, la pharmacienne insiste sur l’importance des CPTS pour « les professionnels de santé et autres professionnels qui participent au parcours de soins » qui ont « plus que jamais besoin d’être préservés dans leur exercice ». Ainsi la CPTS, et plus largement la coordination pluridisciplinaire, peut aussi être une réponse pour éviter au soignant d’être happé par ses obligations professionnelles jusqu’au burn-out. « Les CPTS sont aussi une solution qui permet aux acteurs de se rencontrer, de se connaître, d’apprendre à travailler ensemble », souligne Sophie Sergent. À ses yeux, la CPTS serait donc source d’amélioration des conditions de travail pour les professionnels, ce qui « permettra à terme d’augmenter l’efficience du parcours », et donc d’améliorer la prise en charge du patient.
Un modèle unique
Autre avantage mis en avant par Rebeca Martin-Osuna, kinésithérapeute et secrétaire de la FCPTS : les CPTS ne sont pas figées. « Elles vont évoluer au fil du temps en fonction des besoins des patients et des professionnels. » Sophie Sergent confirme, expliquant qu’on peut créer une CPTS avec 20 professionnels et intégrer de plus en plus de confrères au fur et à mesure du développement de la communauté. « Il est intéressant de fédérer le plus d'acteurs possible sur le territoire, et les plus variés possible, pour pouvoir répondre à toutes les phases du parcours patient. » C’est en tout cas l’un des aspects essentiels mis en exergue par David Guillet, infirmier et vice-président de la FCPTS : « Donner de la clarté dans le parcours patient, en particulier hors les murs de l’hôpital puisqu’on négocie le virage ambulatoire. » Sophie Bauer, chirurgien thoracique et cardiovasculaire à l’hôpital de Melun, membre du conseil d’administration de la FCPTS, prévient néanmoins qu’il ne faudra pas « tomber dans l’écueil des Accountable Care Organisations », le modèle américain dont le gouvernement a souhaité s’inspirer. Car, souligne la spécialiste, ce modèle n’a pas réglé le problème de la prévention et impose de nombreuses contraintes aux patients comme aux professionnels. « En France, fait remarquer Sophie Bauer, nous sommes attachés à la fois à la liberté de prescription du prescripteur et à la liberté de choix de son praticien par le patient. Contrairement à ce que pense le gouvernement, nous sommes en train de construire un modèle unique de coordination et de prévention qui n’existe nulle part ailleurs. »
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