Si la grossesse est menée à terme, l'enfant dispose d'une peau mâture dès la naissance. Elle n'en présente pas moins certaines particularités. Ainsi, le rapport entre sa surface et le poids du bébé est plus important que chez l'adulte ce qui expose l'enveloppe cutanée à un risque d'intoxication plus élevé en cas d'application d'un principe actif par voie topique. Dans ce cas, toute formule susceptible de traverser la peau est donc sujette à précaution. Pour autant, les bébés ne peuvent se passer de soins, notamment ceux qu'impose la toilette. En proie à la poussée hormonale consécutive à la naissance, leur peau et leurs cheveux graissent plus qu'à l'ordinaire. Ils doivent donc faire l'objet d'une hygiène rigoureuse. « Pour l'hygiène du bébé, on utilise de l'eau et un savon doux (syndeth ou savon surgras) qui n'agresse pas l'épiderme, donc pas de savon de Marseille », rappelle le docteur Emmanuelle Bourrat, dermatologue, praticien hospitalier à l'hôpital Robert Debré à Paris. Inutile d'appliquer un émollient après la toilette sous risque de graisser la peau d'avantage. Celui ci ne sera utile qu'en cas de sécheresse cutanée ou pour prévenir l'apparition d'un eczéma atopique. L'érythème fessier, très fréquent chez le nourrisson, pourra nécessiter, en revanche, des soins plus poussés. Au contact des couches qui maintiennent les fesses dans un environnement humide permanent, la peau s'abîme sous l'effet combiné de l'occlusion, de la macération et de la toxicité des selles et de l'urine.
Irritation et eczéma
Pour prévenir l'apparition d'un érythème, il faudra changer l'enfant souvent après avoir nettoyé soigneusement le siège à chaque change. Si la peau est saine, inutile d'appliquer une crème. Dans le cas contraire, une formule cicatrisante peut être utilisée en toute petite quantité à bien faire pénétrer. « Aucun produit n'a fait la preuve de son efficacité face à l'érythème fessier », poursuit la dermatologue. « La pâte à l'eau, cependant, peut isoler la peau du milieu humide et agressif de la couche. Mais le mieux est de laisser la peau à l'air libre autant que possible, d'éviter les topiques qui généralement aggravent l'irritation ou la macération et surtout de ne pas utiliser de couches lavables ».
Plus problématique que l'érythème fessier, l'atopie touche près de 20 % des enfants en France. Multifactorielle, elle résulte d'une prédisposition génétique à la maladie allergique associant, dans des proportions variables, une déficience de la barrière cutanée, une anomalie immunologique et des facteurs environnementaux encore mal connus. « La manifestation la plus fréquente de l'atopie est l'eczéma atopique qui peut survenir vers 3 mois et se résorbe généralement vers 3 ans. A la puberté, 90 % des eczémas sont guéris ». L'affection se traduit par l'apparition de plaques rouges et suintantes sur la peau accompagnées de démangeaisons. Lourde de répercussions sur la vie quotidienne, elle évolue par poussées et ne dispose que d'un traitement symptomatique qui par ailleurs est efficace. « Pour éviter que l'enfant ne se gratte et s'infecte, le seul recours lors d'une poussée est l'utilisation de dermocorticoïdes. Ils font malheureusement l'objet d'une phobie totalement injustifiée puisque, dans 90 % des cas d'eczéma atopique, ils sont dénués d'effets secondaires – et utilisables chez le très jeune enfant ou lors d'une exposition solaire ». En relais des dermocorticoïdes, une crème émolliente, choisie par le patient ou le parent, doit être appliquée quand la peau ne gratte plus pour limiter les poussées. La toilette, quant à elle, sera effectuée à l'aide d'un syndeth ou d'un savon surgras.
Petites infections
Une autre spécificité de la peau de l'enfant est l'immaturité de son système immunologique. De ce fait, il est plus exposé que l'adulte aux petites infections cutanées que sont l'impétigo, les verrues ou le molluscum contagiosum (la « verrue d'eau »). Infection bactérienne due au streptocoque ou au staphylocoque, l'impétigo se transmet par contact, plus fréquemment chez les petits enfants. « Sur la peau, il forme des petites bulles remplies de pus, puis des croûtes que les enfants grattent propageant ainsi les bactéries à toute la zone autour de la bouche et des narines », explique Emmanuelle Bourrat. Après avoir nettoyé les lésions à l'eau et au savon antiseptique, l'affection se traite à l'aide d'une crème antibiotique ou par antibiotiques par voie générale si elle est trop étendue. Les verrues des mains et des pieds sont également fréquentes chez l'enfant qui se contamine très facilement par simple contact avec le virus HPV présent sur toutes les surfaces qui nous entourent, le sol des piscines notamment. « Aucun traitement n'a fait preuve d'efficacité dans l'éradication des verrues. Il faut attendre que le sujet s'immunise contre l'HPV, ce qui finit toujours par se faire ». Des formules kératolytiques peuvent être utilisées pour abraser la couche cornée épaisse qui surmonte la verrue et qui est parfois douloureuse. « Inutile d'interdire la piscine aux enfants atteints de verrues car le contact avec ce virus ubiquitaire aura forcément lieu ». Il en est de même pour une affection cutanée virale et bénigne, le molluscum contagiosum. « Comme pour la verrue, il faut attendre que le système immunitaire réagisse et se débarrasse du virus. L'utilisation d'un produit kératolytique peut s'envisager mais seulement après avoir consulté un dermatologue ». Quant à l'hémangiome, il s'agit d'une tumeur capillaire bénigne fréquente de l'enfant qui régresse spontanément avant l'âge de 3 à 5 ans. « Dans 10 % des cas, un traitement destiné à bloquer l'évolution sera nécessaire afin d'éviter des séquelles vitales, fonctionnelles ou esthétiques. Depuis 2014, il existe une solution thérapeutique constamment et rapidement efficace en plus d'être bien tolérée, le propranolol pédiatrique ».
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