Allergie, immunité, asthme…

L'allergie au fil de l'âge : une question de maturité ?

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Publié le 28/01/2019
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De l'enfance à l'âge adulte, l'allergie évolue de façon aléatoire. Selon les individus et leur environnement, les manifestations allergiques s'atténuent, se transforment… mais le terrain allergique ne disparaît pas.
atopie

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Crédit photo : ANTHONY COOPER/SPL/PHANIE

« Quand j'étais petit, j'étais allergique ». Une confidence que vous avez certainement déjà entendue au comptoir. Pour ces patients, l'allergie appartient-elle réellement au passé ? « L'allergie se manifeste différemment au fil de l'âge chez une même personne. Dans certains cas, les symptômes disparaissent complètement pendant plusieurs années », explique le Dr Agnès Sergent, allergologue clinicienne en médecine libérale. À l'âge adulte, les manifestations allergiques peuvent donc se mettre en mode veille, ou se transformer. L'évolution est difficile à prévoir, et dépend de plusieurs facteurs dont l'environnement et le terrain atopique familial. « Le jeune âge est marqué par les allergies alimentaires et cutanées. Les allergies à manifestation respiratoire, comme l’asthme, surviennent ensuite », observe Agnès Sergent. D'un point de vue immunologique, la notion d'atopie permet de comprendre l’évolution individuelle de l’allergie. « L'atopie est définie comme une susceptibilité à produire des IgE (immunoglobulines E) vis-à-vis des allergènes. C’est le phénomène de sensibilisation. À ce stade, il n'existe pas de manifestations cliniques. La dégranulation de cellules de l'immunité comme les mastocytes suite à un contact ultérieur avec l'allergène provoque la libération de différents médiateurs à l'origine de l'apparition de manifestations cliniques, lesquelles peuvent être très diverses. On parle alors d'allergie. Il arrive qu'un sujet atopique ne déclare des symptômes allergiques qu'à l'âge adulte. Mais au final, le sujet atopique présente toute sa vie une susceptibilité individuelle à un ou plusieurs allergènes, avec une évolution dans le temps » commente le Dr Angélique Chauvineau-Grenier, pharmacien biologiste.

Du bouleau à la pomme : les allergies se croisent

La sensibilisation de l'individu est donc élémentaire dans le processus allergique, et ce mécanisme de sensibilisation primaire expose au risque de sensibilisation secondaire. « Il faut toujours envisager les allergies croisées ; par exemple, en cas d'allergie aux graminées, il existe un risque accru d'allergie alimentaire au melon, ou à la pomme de terre », rapporte Agnès Sergent. Autre exemple de réaction croisée : les pollens de bouleau et la pomme. « Chez un enfant qui présente une allergie respiratoire mettant en cause les pollens de bouleau, une allergie alimentaire à la pomme peut être observée à un âge pus avancé avec une nouvelle symptomatologie comme des picotements dans la bouche », complète Angélique Chavineau-Grenier. « C'est une évolution naturelle de l'allergie, liée au mécanisme d'allergie croisée. Cela s'explique par le fait que l'individu réagit à certaines protéines contenues dans la pomme, très proches de certaines protéines du pollen de bouleau auxquelles il était allergique dans l'enfance ».

Les bénéfices d'une prise en charge correcte dès l'enfance

S'il est difficile de « modifier le terrain atopique », une prise en charge adaptée de l'allergie dans l'enfance favorise une évolution positive à l'adolescence ou à l'âge adulte. C'est particulièrement vrai pour l'asthme, où le traitement de fond limite la détérioration de l'appareil respiratoire. Autre stratégie, la désensibilisation est une méthode curative permettant d'améliorer la tolérance de l'organisme vis-à-vis des allergènes. « Elle consiste à exposer l'individu de façon régulière à des extraits allergéniques, pendant une période prolongée. On peut comparer son mode d'action à celui d'un vaccin, avec une protection sur le long terme », détaille Agnès Sergent. La désensibilisation, ou immunothérapie allergénique, permet ainsi aux allergiques d'avoir un peu de répit. « Elle s'adresse aux allergies respiratoires, en cas de sensibilisation aux acariens, aux moisissures (un type), ou aux poils de chat. Cette méthode a des effets limités dans le temps. La rémanence est estimée à une dizaine d'années », précise le Docteur Agnès Sergent. L'âge légal de la désensibilisation est 5 ans. Au-delà, elle peut être réalisée à tout âge.

David Paitraud

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3490