150 millions de sujets atteints par le virus de l’hépatite C dans le monde, 500 000 morts par an par complications à type de cirrhose et carcinome hépatocellulaire, 1re cause de transplantation hépatique… L’énumération de ces chiffres interpelle alors que l’hépatite C est une infection virale pouvant être guérie.
Depuis décembre 2016, une révolution est en marche avec l’arrivée des nouveaux antiviraux à action directe (AAD), supplantant l’ancienne association Peg-interféron et ribavirine considérée comme le traitement de référence. Leurs avantages ? Meilleure efficacité, meilleure tolérance, plus courte durée de traitement et administration par voie orale.
Un peu de pharmacologie
Les principes actifs des AAD agissent au niveau de la réplication cellulaire, en ciblant 3 protéines non structurales : la protéase virale NS3/4A, la phosphoprotéine NS5A et la polymérase NS5B assurant la réplication virale.
Les premiers inhibiteurs de la protéase virale NS3/A4 (IP) étaient associés à la bithérapie pégylée afin d’améliorer l’efficacité chez les patients infectés par le génotype 1. Malgré une bonne RVS 24 (Réponse Virologique Soutenue, montrant une charge virale indétectable 24 semaines après l’arrêt du traitement), les nombreux effets secondaires et interactions médicamenteuses, ainsi que l’absence d’efficacité sur les autres génotypes viraux, ont conduit à leur abandon. Ainsi, les IP de 2e génération, tels que le siméprévir et les AAD ont fait leur apparition en 2014. Le traitement associe plusieurs molécules combinées au sein d’un même comprimé, sans l’ajout d’interféron. Les résultats sont sans appel : des taux de RVS12 (charge virale indétectable 12 semaines après l’arrêt du traitement) supérieurs à 90 %, une très bonne tolérance et une résistance vaincue.
Les indications sont aujourd’hui établies et reconnues par les sociétés savantes. Elles prennent en compte la sévérité de la fibrose, mesurée par les marqueurs non invasifs, le génotype et les traitements antérieurs. Les malades également infectés par le VIH peuvent bénéficier du traitement, tout aussi efficace en cas de co-infection. En revanche, le traitement de l’hépatite C aiguë n’est pas encore une indication aux AAD. Le suivi de ces nouveaux traitements se focalise sur les interactions médicamenteuses, le risque de résistance et la survenue d’effets secondaires.
L’accès universel aux AAD
En mai 2016, la ministre des Affaires sociales et de la Santé a annoncé l’accès universel aux traitements innovants contre l’hépatite C. Conséquences ? Un élargissement des indications remboursées, la prescription sans validation obligatoire par une RCP (Réunion de Concertation Pluridisciplinaire), sauf pour certains cas complexes, et surtout un accord avec les laboratoires pour la baisse du coût des traitements. Malgré un rapport coût/efficacité positif, le prix des cures restait très élevé, entre 40 000 et 100 000 euros selon le schéma posologique. Après négociation avec les laboratoires, le prix des AAD a été abaissé à 28 700 euros par cure. Les traitements commercialisés sont également pris en charge à 100 % par l’assurance-maladie.
Autre évènement garantissant un meilleur accès aux AAD : l’arrivée en mars 2018 du Marivet en officine, ces molécules étant jusqu’alors dispensées en PUI. L’association comprend le glécaprévir, inhibiteur de la protéase NS3A/4A et le pibrentasvir, inhibiteur de la polymérase NS5A. Le Marivet a montré une efficacité virologique importante (RVS > 90 %) avec une durée de traitement courte, entre 8 et 12 semaines, sans addition de ribavirine. La prescription est hospitalière et réservée aux spécialistes en gastro-entérologie et hépatologie, en médecine interne ou en infectiologie.
Et l’avenir ?
L’objectif principal de l’accès universel aux traitements de l’hépatite C est d’éradiquer le virus en France. Pour les populations les plus exposées au risque d’hépatites virales, des mesures d’information, de prévention et de dépistage sont également mises en place, dont l’utilisation de Tests Rapides d’Orientation Diagnostique (TROD).
Du côté officinal, d’autres spécialités d’AAD seront bientôt disponibles tels que Epclusa, Sovaldi, Harvoni et Vosevi, ce dernier étant réservé pour les patients n'ayant pas répondu favorablement aux autres traitements. Enfin, l’Afef (Association française pour l’étude du foie), dans ses recommandations publiées en mars 2018, plaide pour la prescription des AAD par l’ensemble des médecins, ainsi que leur suivi par un personnel soignant non médecin.
Article précédent
Connaissez-vous l’hépatite médicamenteuse ?
Article suivant
Quand les troubles digestifs s'invitent au comptoir
Trois ordonnances à digérer
Comment soigner les colères intestines
Intestin irritable : une affaire de bactéries
Étape par étape, le voyage digestif du médicament
Testez-vous : Questions en transit
Conseils nutritionnels pour tube digestif heureux
Connaissez-vous l’hépatite médicamenteuse ?
La révolution des antiviraux à action directe
Quand les troubles digestifs s'invitent au comptoir
Dépistage du cancer colorectal : la précision de l’immunologie
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques