1. Le pharmacien français en 2022
Nous sommes à présent en 2022, le pharmacien est un acteur majeur permettant l’accès aux soins. En effet, grâce à la Réforme Santé de ces 4 dernières années, nous avons su passer au-delà des clivages entre les différents professionnels de santé, et ainsi mettre l’intérêt du patient au cœur des priorités. La pharmacie constitue la porte d’entrée dans le système de soins, ainsi que l’un des piliers majeurs des soins non-programmés, et ce grâce à son omniprésence sur le territoire et son amplitude horaire proposée de façon importante. Le pharmacien a maintenant la capacité de dispenser sous protocole (dit “prescription pharmaceutique”) grâce à des arbres décisionnels, et le notifie dans le dossier médical partagé (DMP). Ceci permet au pharmacien de prendre en charge la majorité des pathologies courantes ne relevant pas d’urgences vitales, et par conséquent désengorger les urgences. Afin d’éviter le “non-recours” aux soins si cette prise ne relève pas de la compétence du pharmacien, ce service est couplé à la téléconsultation.
La pharmacie est le lieu de santé, le plus fréquenté par les usagers “non malades”, permettant ainsi de considérer le pharmacien comme un acteur majeur de la prévention et du dépistage. L’implication des pharmaciens dans le dépistage du cancer colorectal a permis de faire augmenter de manière significative son taux de dépistage. Le pharmacien accompagne le patient dans son dépistage en interprétant les résultats et en l’orientant. Tout au long de cette pratique, le pharmacien prodigue des conseils personnalisés pour chaque patient. En sa qualité d’acteur majeur de santé publique, le pharmacien prend part de façon active à la prévention collective, mais également sous forme individualisée. Il dispense de l’information en santé et pratique également la vaccination de la population de façon coordonnée avec les autres professionnels de santé. Afin d’assurer cette couverture vaccinale, il dispose d’une notification sur son écran lui rappelant d’effectuer le rappel vaccinal DTP/Coqueluche/ROR//HPV du patient.
L’incidence des patients présentant une pathologie chronique a augmenté tout au long de ces dernières années et ceux-ci ont la chance d’être pris en charge par une équipe de soins pluridisciplinaire et coordonnée. Dans le cadre de cet exercice commun, le pharmacien peut prescrire des analyses biologiques afin de vérifier l’efficience et la sécurité des traitements pour finalement adapter les posologies en fonction des objectifs thérapeutiques fixés par l’équipe de soins.
Ce professionnel assure dans cette même dynamique la surveillance et la tolérance des médicaments. Détecter la potentielle survenue des effets indésirables des nouveaux médicaments en condition de vie réelle devient un objectif nécessaire. Ainsi, ce professionnel de santé n’est plus uniquement derrière son comptoir mais effectue également des dispensations à domicile. Dans ce cadre, il réalise des bilans partagés de médication afin de réévaluer l’efficience des traitements et d'améliorer l’observance thérapeutique pour mettre en place les PDA si nécessaire. De plus, il évalue la fragilité des patients pour prévoir une adaptation de leur domicile, et ce dans le but de lutter contre la perte d’autonomie et éviter les réhospitalisations.
La qualité est le maître mot de la prise en charge coordonnée des patients. C’est ainsi que les équipes de soin d’un territoire se réunissent régulièrement pour effectuer des cercles qualités afin d’améliorer la qualité de la prescription. Dans cet objectif, les différents professionnels de santé abordent la stratégie thérapeutique, son efficience et sa sécurité. Cette pratique s’opère sur des cas suffisamment complexes méritant le partage de responsabilités dans une collaboration interdisciplinaire constructive. L’impact de ces cercles sur les coûts des médicaments et les profils de prescription médicale est démontré et leur diffusion se fait progressivement. Afin d’assurer cette qualité des soins, les pharmacies sont engagées dans un processus d’assurance qualité et de bonnes pratiques métier. Elles assurent une véritable qualité dans la dispensation des médicaments, et tout particulièrement pour les nouveautés, grâce à une mise à jour régulière des compétences de l’équipe. Ce professionnel ne manque pas de garantir les conseils, l’évaluation du bénéfice/risque et la traçabilité sur le DMP des produits de santé sans ordonnances. De plus, les services pharmaceutiques dans leurs nouvelles missions doivent également respecter ces bonnes pratiques. L’utilisation de l’ensemble des compétences du pharmacien et la certification de la qualité de ces pratiques permettent de revaloriser le métier de pharmacien d’officine pour le rendre plus attractif. Ce professionnel de santé reconnu et apprécié, maillon fort du système de soins, ne saurait donc, en aucun cas, être remplacé par un grand distributeur.
2. Le modèle économique de l’officine de demain
Dans un premier temps, l’ANEPF souhaite des rémunérations qui permettent de pérenniser l’implantation homogène des pharmacies sur notre territoire. La pharmacie est un lieu de prise en charge immédiate des soins de premier recours et constitue également un carrefour majeur de l’orientation des patients dans le parcours de soins. Pour que cela reste possible, son maillage doit demeurer intact et le pharmacien doit se voir déléguer plus d’options de prise en charge, particulièrement dans les déserts médicaux. En outre, nous soutenons un modèle économique qui ne soit plus à l’antipode de la prévention, de la qualité de prise en charge du patient et de l’efficience des traitements.
Nous devons en finir avec le temps où l’intérêt financier du pharmacien était dans la quantité de médicaments dispensés, c’est-à-dire en finir avec le temps où plus le patient était malade plus le pharmacien gagnait sa vie, pour privilégier et rémunérer la qualité de la prise en charge. Des honoraires, des rémunérations à la capitation, des rémunérations à la performance en santé : voici des pistes qui constitueraient des forfaits attribués au pharmacien référent ou à l’équipe de soins coordonnés (ESP, MSP, CPTS) pour la qualité de sa prise en charge (cercles qualités, éducation thérapeutique patient…) et son atteinte des objectifs de santé publique (prévention, dépistage…). En perspective, les pharmaciens doivent prendre conscience que l’analyse des données de santé de leur population à des fins de recherche et de santé publique pourra constituer une source de rémunération majeure de l’officine de demain.
3. L’acquisition d’officines par de jeunes pharmaciens
Il faut remettre en cause la pratique de certains groupes financiers dont l’éthique est douteuse. En effet, ces derniers n’hésitent pas à recruter des jeunes pharmaciens rencontrant des difficultés à s’installer pour les placer finalement dans une situation d’extrême dépendance. Ils proposent ainsi à des étudiants sur les bancs de l’université, de devenir titulaires d’officines, sachant que les financements proposés dépassent de très loin leurs capacités financières. Ainsi, lorsqu’on lit entre les lignes, le jeune pharmacien devient un porte diplôme aliéné à une machine économique incontrôlable.
À l’évidence ces offres non éthiques sont la résultante du problème lié à la nécessité d’avoir un apport conséquent pour pouvoir accéder à l’acquisition. Ces groupes ont donc tout simplement répondu au besoin des futurs titulaires, lesquels s’endettent vis-à-vis d’eux pour se constituer leur apport.
Nous lançons un appel à la profession, afin de demander la création d’offres éthiques, respectant la déontologie et l’indépendance du pharmacien. La constitution d’un fond institutionnel grâce à la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP) est une formule intéressante. Les initiatives individuelles comme l’investissement par les pairs sous forme de tutorat peuvent être également porteuses. Dans tous les cas, il est nécessaire que ces systèmes assurent la viabilité des reprises et l’accompagnement du futur titulaire.
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