L’idée de créer des entretiens pharmaceutiques pour les personnes sous buprénorphine serait à l’étude. Ce projet vous paraît-il un bon choix ? Un tiers seulement (33,1 %) des pharmaciens pense que « oui », selon une enquête réalisée sur notre site lequotidiendupharmacien.fr du 3 au 17 juin (248 réponses).
« Cela renforcera le rôle indispensable du pharmacien dans la prise en charge des toxicomanes et surtout évitera les mésusages (par voie injectable, commerce…) qui restent toujours d'actualité », estime ainsi Mathilde. « Notre rôle est de les accompagner régulièrement dans leur traitement comme nous le faisons pour de nombreux patients chroniques », indique pour sa part
Xavier.
Pour Sylvie, il ne faut pas avoir de préjugés, « ce sont des malades comme les autres, dont beaucoup sont en phase de réinsertion ». « Bien sûr, nous ne pourrons pas tous les suivre en entretien, mais il faut penser à la grande majorité d'entre eux qui ne sont pas agressifs, et avec qui tout se passe bien, mais qui ont besoin d'une écoute plus importante », ajoute-t-elle. Mais de nombreux confrères craignent qu’au final ces entretiens représentent plutôt du temps perdu. « Malgré l'attention qu'on leur porte et le suivi, combien en avons-nous réellement aidé à décrocher ? » interroge ainsi Benoît.
Des conditions indispensables
Parmi les pharmaciens favorables à la mise en place de ce type d’entretiens pharmaceutiques, certains souhaitent tout même que l’on y mette des conditions. François propose, par exemple, que l’on donne les moyens aux officinaux de contrôler les dispensations afin de limiter les abus liés au nomadisme pharmaceutique. Il plaide aussi pour une substitution générique obligatoire.
Nicolas pense, lui, que l’accompagnement doit s’inscrire dans le cadre d’un suivi addictologique global en relation avec un centre de soins d'accompagnement et de prévention en addictologie. Il juge également indispensable que les pharmaciens aient suivi la formation entretien motivationnel.
Mais la première des conditions est d’y adjoindre une rémunération correcte. « Tout est une question de formation et de rémunération », affirme ainsi Hervé, qui rappelle qu’actuellement, le temps passé pour la dispensation d'un TSO « fait que nous ne sommes pas rémunérés, voire déficitaires ». « Commençons déjà à rémunérer convenablement la dispensation de base pour l'ensemble des confrères avant de monter une nouvelle usine à gaz pour d'éventuels entretiens qui n'intéressent pas… les intéressés », lance-t-il. Sentiment partagé par Thilo D. qui ne voit pas ces patients « accepter un rendez-vous d'entretien ».
« De toute manière, quelle que soit la raison de l'entretien (asthme, AVK, buprénorphine) la " rémunération " qui en découle est une insulte à notre niveau d'étude », tranche Guillaume. « On paye 200 euros HT (si pas plus) l'heure d'un avocat pendant qu'on serait défrayés de 40 euros pour 1 heure de boulot, 40 euros qui en plus sont payés au bout d'un an, déplore-t-il. Ces entretiens doivent être effectués de surcroît par un pharmacien : si le pharmacien est un salarié, il est payé en gros 50 euros de l'heure avec les charges. Serait-ce travailler plus pour perdre du fric ? » Le chemin semble donc long pour convaincre les 66,9 % de confrères qui répondent « non » au projet d’entretiens TSO.
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