Les honoraires de dispensation* ont représenté l’an passé près de 120 000 euros en moyenne par officine. Leur mise en place, le 1er janvier 2015, a dégagé une différence positive d’environ 75 millions d’euros pour le réseau par rapport à l’ancien mode de rémunération. Même s’ils ont permis d’amortir les baisses de prix sur le médicament appliquées en 2015, ce montant reste toutefois insuffisant pour les compenser totalement, comme l’a récemment souligné le réseau d’experts-comptables CGP (« le Quotidien » du 7 avril).
Alors que faire pour corriger le tir ? Philippe Besset, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), estime que la prochaine convention pharmaceutique, prévue pour 2017, devra contenir des mécanismes compensateurs afin d’anticiper les mesures sur le médicament. Mais compte tenu de la situation difficile que rencontrent actuellement de nombreuses pharmacies, la FSPF demande la mise en œuvre rapide du plan d’urgence qu’elle a soumis au gouvernement et au président de la République.
Le syndicat y propose notamment d’étendre l’honoraire pour les ordonnances complexes (de 5 lignes et plus) à l’ensemble des prescriptions pour les patients chroniques en ALD. Il demande également de doubler son montant et de le faire passer à 1 euro HT. Des solutions relativement simples à mettre en place et qui « permettraient de compenser la perte liée aux baisses de prix sur le médicament », estime le président de la FSPF, Philippe Gaertner.
Quoi qu’il en soit, pas question pour lui d’abandonner le principe des honoraires. « Je souhaite continuer sur cette voie pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés à la Fédération : détacher de plus en plus la rémunération du prix industriel et des volumes », expliquait-il récemment au « Quotidien » (notre édition du 24 mars). « Je reste favorable à la mise en place d’un honoraire à l’ordonnance », ajoutait-il, précisant que cet honoraire serait complémentaire de celui liée à la dispensation.
« Nous souhaitons aussi le développement de prises en charge d’actes pharmaceutiques, telles les interventions pharmaceutiques, ou les accompagnements de patients particuliers, souligne Philippe Gaertner. Ces prises en charge pourraient prendre la forme de paiement à l’acte ou de rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP). »
Une rémunération à l’acte
Très critique sur la réforme de l’honoraire, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) veut rediscuter avec les pouvoirs publics. « L’objectif de la négociation n’est pas de bricoler des mesures pour colmater les brèches provoquées par la nouvelle rémunération, les baisses de prix et de volumes, explique son président, Gilles Bonnefond. Ce n’est pas comme cela que l’on aura de la visibilité. Il faut, au contraire, construire un projet d’envergure pour la profession, permettant de relever le défi de l’organisation du système de santé, de valoriser les atouts de la pharmacie, de relancer nos entreprises et de redonner des perspectives aux jeunes. »
L’USPO souhaite qu’une partie de la rémunération soit à l’acte, « centrée sur la validation de l’ordonnance », à laquelle s’ajouterait une rémunération des nouvelles missions. À la différence de la FSPF, le syndicat présidé par Gilles Bonnefond, plaide pour la réintégration de l’honoraire à la boîte dans la marge de dispensation, « afin que l’affichage des prix ne soit plus un casse-tête ». « Pour ne pas perturber la vie conventionnelle, pour un médicament non prescrit, la partie fixe de 1 euro serait intégrée au prix public TTC tandis que pour un médicament prescrit, elle serait remplacée par un honoraire de dispensation », détaille le président de l’USPO.
Les effets délétères du capage
De son côté, l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF) pointe le capage des produits de la dernière tranche de la MDL** introduit par la réforme de la rémunération, car « c’est la tranche la plus dynamique ». Tandis que le nombre des unités dispensées est assez stable (-0,5 %) sur les quatre dernières années, l’UNPF relève, sur la même période, une explosion des volumes pour les produits dont le prix est supérieur à 1 500 euros (+1,41).
« La marge des pharmaciens est en régression (-7,27 %) en raison du capage, mais également des nombreuses baisses de prix décidées par le CEPS***, souligne l’UNPF. Les baisses de prix sont d’ailleurs focalisées sur les tranches qui rémunèrent le plus le pharmacien. » Dans ce contexte, « il est urgent de renégocier la rémunération et d’introduire une rémunération à l’acte intellectuel », estime le syndicat présidé par Jean-Luc Fournival.
L’évolution vers un honoraire à l’ordonnance fait donc consensus au sein de la profession. Dans ces conditions, pourquoi ne pas avoir opté immédiatement pour ce principe ? « Il n’était pas possible de basculer une part aussi importante de la rémunération sur le seul honoraire à l’ordonnance, car son impact est trop diversifié sur le réseau, avec un jeu de gagnants et de perdants trop important », répond Philippe Gaertner. Mais aussi parce que l’assurance-maladie n’est pas capable aujourd’hui d’identifier clairement les ordonnances. Pour l’organisme payeur, l’instauration de ce type d’honoraire suppose un prérequis : le développement de la prescription électronique.
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