Baisse de prix, stagnation de la pénétration des génériques… la pharmacie française va mal. Toutefois, la réforme de la rémunération des officinaux pourrait laisser augurer d’une amélioration de la santé financière de leurs officines.
Mathilde Lignot-Leloup, directrice déléguée à la gestion et à l’organisation des soins à la Caisse nationale d’assurance-maladie, rappelle que, « un an après l’instauration de l’honoraire de dispensation à la boîte et sur ordonnances complexes de plus de cinq lignes, les pharmaciens ont réussi à transférer vers l’honoraire quelque deux milliards d’euros sur une marge de cinq milliards d’euros ». Selon elle, cette évolution leur aurait permis de « préserver quelque cinquante millions d’euros que les baisses de prix leurs auraient fait mathématiquement perdre ». Les derniers résultats de l’observatoire de la rémunération évaluent même la différence positive entre le nouveau et l’ancien mode de rémunération à environ 75 millions d’euros (« le Quotidien » du 11 avril).
Pas à la hauteur
Un constat que ne partage pas du tout le président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Gilles Bonnefond considère en effet que la réforme du mode de rémunération visant à la fois à instaurer une rémunération sur objectifs de santé publique et des honoraires de dispensation n’est pas à la hauteur de l’ambition affichée par la politique conventionnelle. « Cette réforme est ratée sur le plan économique puisque, en un an, les pharmaciens ont perdu 147 millions d’euros de marge et 44 millions d’euros supplémentaires depuis le début de l’année », déplore-t-il. Une accélération qui tiendrait, selon lui, à « la perversité même de la réforme puisque l’instauration d’une partie fixe de la rémunération liée à la boîte vendue ne peut aboutir à une déconnection de la marge des volumes ». Pire ! « La suppression des huit centimes de marge liée à la dispensation des traitements chroniques au profit d’une marge sur les traitements aigus va à l’encontre même de l’évolution du métier de pharmacien qui doit tendre au bon usage et à l’observance. » Un avis pleinement partagé par le secrétaire général de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), Éric Myon, qui « regrette le transfert vers les complémentaires d’une partie de la rémunération des pharmaciens, alors même que l’accompagnement des patients chroniques est l’évolution naturelle du métier d’officinal ».
« À l’instar de ce que les Belges ont fait, il y a pourtant urgence à généraliser le principe de l’honoraire pharmaceutique afin de sécuriser le revenu des officinaux et de préparer l’évolution de la profession », estime au contraire Francis Mégerlin, maître de conférence en droit et en économie de la santé.
Quoi qu’il en soit, dans la perspective de la nouvelle convention pharmaceutique qui devrait voir le jour en juin 2017, plusieurs pistes de réflexion sont d’ores et déjà à l’étude. « La généralisation de l’honoraire à l’ordonnance, qui reviendrait à reconnaître le principe d’une rémunération minimale pour toute dispensation sur ordonnance, est une piste à creuser, mais ce n’est pas la seule », estime Mathilde Lignot-Leloup, qui considère « la prescription électronique de médicaments comme une réelle source de réflexion aux côtés des rémunérations sur objectif de santé publique ».
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